Si en 2025 la génération Z a eu raison du pouvoir, portée par des revendications sociales, elle semble pourtant tenir d’aînés qui ont balisé un chemin. En 1947, Madagascar ouvre la voie vers les indépendances par une révolte portée entre autres par la paysannerie, matée dans le sang par les colons et leurs supplétifs des colonies.
Vingt-cinq ans plus tard, en 1972, une vaste mobilisation menée par les étudiants et les travailleurs renverse l’ordre établi et précipite la dynamique de la révolution culturelle avec, à l’horizon, la malgachisation.
Enfin, en 2001 et en 2002, une élection présidentielle disputée et une crise post-électorale plongent le pays dans la paralysie, opposant deux camps revendiquant chacun la légitimité du pouvoir. Les manifestations massives à Antananarivo confirment le rôle central de la contestation populaire dans la vie politique malgache.
Avec la participation de :
Michèle Rakosoton, écrivaine malgache
Denis-Alexandre Lahiniriko, historien et maître de conférences au département d'histoire de l'université d'Antananarivo et à l'université catholique de Madagascar
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L’émission explore la longue tradition de résistance qui marque Madagascar depuis le XIXᵉ siècle. Située entre influences française et britannique, l’île développe très tôt une culture politique d’insoumission face aux abus et aux logiques coloniales. La révolte éclate dans un contexte de tensions extrêmes : travail forcé, réquisitions, pauvreté, humiliation quotidienne et code de l’indigénat.
La société secrète Jina, composée d’anciens soldats et de militants nationalistes, cristallise la colère des populations rurales et prépare la date symbolique du 29 mars 1947. Si Tananarive reste sous contrôle, les régions de Moramanga, Manakara et la côte est s’embrasent. Les insurgés, souvent mal armés, visent les postes administratifs et les symboles de l’autorité coloniale. Le mouvement est rural, populaire, spontané, nourri de solidarités communautaires.
L’armée française mène une répression méthodique : villages incendiés, déplacements forcés, exécutions, tortures, procès massifs. Les estimations évoquent entre 30 000 et 40 000 morts, ce qui fait de 1947 l’un des épisodes les plus sanglants de l’histoire coloniale française.
Cette tragédie marque durablement les familles et la société malgache. L’écrivaine Michèle Rakotoson insiste sur le silence traumatique qui se transmet entre générations, mais aussi sur la capacité de la littérature à redonner voix aux oubliés et à reconstruire un récit national.
Dans les années 1950, les partis nationalistes se divisent entre négociations modérées et radicalité. Le PADESM (Parti des déshérités de Madagascar), soutenu par l’administration coloniale et représentant surtout les élites côtières, capte le processus d’indépendance, obtenue en 1960 sans véritable rupture.
Une nouvelle révolte éclate en 1972, cette fois dans les villes. Étudiants et lycéens dénoncent un système éducatif hérité de la colonisation, inadapté et profondément inégalitaire. Inspirés par les mouvements révolutionnaires internationaux, ils mobilisent ouvriers, fonctionnaires et paysans.
Les manifestations se généralisent, paralysent le pays et renversent le président Tsiranana. Beaucoup de Malgaches considèrent dès lors 1972 comme la « véritable » indépendance, celle gagnée par les luttes internes plutôt que par une transition contrôlée par la France.
Published on 8 hours ago
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